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Spéciale journée de la femme : Il était une fois Mantoulaye Guene, l’héroïne du Parti socialiste à Thiès

Voilà presque 31 ans que Mantoulaye Guène, une femme au parcours politique admirable, est sous terre. Mais, elle vit toujours dans le cœur des séniors de la ville de Thiès. Accessible, modeste et naturelle avec son franc-parler, cette femme à la bienveillance incroyable a consacré son engagement politique à l’amélioration de la vie des jeunes, des femmes et des personnes âgées de l’époque. Elle manque à beaucoup de nécessiteux de la Cité du rail.

Mantoulaye Guène, puisque c’est d’elle qu’il s’agit, allait fêter ses 83 ans cette année. Mais, sur cette vallée des larmes où nous sommes programmés pour ne passer qu’un moment, elle a bouclé son tour le 19 janvier 1991, à l’âge de 52 ans, suite à une longue maladie qu’elle a combattue jusqu’au bout, avec les armes de courage, de lucidité et de détermination que tous et toutes lui connaissaient. Née en 1939 à Dakar, elle a fait ses études au collège Hameth Fall de Saint-Louis, puis au Cours normal de Rufisque. Mantou, comme on l’appelait familièrement, qualifiée de « militante au parcours sans faute dans le parti », est entrée dans l’Union progressiste sénégalaise (Ups) le 9 juin 1964 et est élue trésorière du premier bureau national des femmes.
Elle fut ensuite élue secrétaire administrative de la Coordination communale Ups. Quand cette formation est rebaptisée Parti socialiste (Ps), Mantoulaye Guène en était la présidente de la Coordination communale de Thiès et la première vice-présidente du Conseil régional des femmes de Thiès. Enseignante de formation, elle était cette amazone socialiste qui, à l’image d’Adja Arame Diène de Dakar, incarnait le courage et la conviction, la foi et l’engagement, la fidélité et l’attachement à son pays qu’elle a servi jusqu’à la sublimation. Cette héroïne du Ps, élue députée pour la première fois en 1983, a été de toutes les batailles du développement aux côtés du Président Abdou Diouf qu’elle appelait « Mon ami et frère ».
C’est avec une pointe de regret que Fatou Ndiaye, 72 ans, évoque « les hauts faits politiques de Mantou qui a toujours su, par sa foi et son engagement, mobiliser tous les Thiessois autour d’un idéal commun : l’épanouissement des populations ». Elle nous rappelle l’extraordinaire mobilisation qu’elle avait suscitée autour du Président Abdou Diouf lors de la célébration du centenaire de la mort de Lat Dior en 1986. « Ce jour-là, les Thiessois sont restés éveillés toute la nuit pour ne pas rater l’accueil historique qu’on devait réserver au Chef de l’État d’alors », nous conte-t-elle. À son tour, celle qui a donné le meilleur d’elle-même à Thiès a reçu un accueil mémorable de la part des populations au lendemain de sa nomination, en janvier 1986, au poste de Ministre du Développement social.
Au moment de sa nomination, Mantou était députée, membre du Bureau de l’Assemblée nationale et première vice-présidente du Conseil municipal de Thiès. À l’école en tant qu’enseignante, dans les instances politiques en qualité de militante ou de responsable, comme à son poste de chef d’un département ministériel (janvier 1986-avril 1988), en remplacement de Mme Maïmouna Kane, elle a partout et de tout temps considéré ses missions comme un sacerdoce, une œuvre historique qu’elle se devait de remplir avec le plus grand dévouement. Mantoulaye Guène est à l’origine du format toujours actuel de la Quinzaine de la femme sénégalaise. Sous sa houlette, des avancées stratégiques significatives ont été faites dans le cadre des politiques de promotion féminine.

Une énorme perte
Réélue députée en 1988, Mantoulaye Guène, présidente de la Commission éducation et culture de l’Assemblée nationale, meurt au cours de son mandat, le 19 janvier 1991. Sa disparition a provoqué une vive émotion à Thiès. Aux milliers d’anonymes (jeunes talibés, handicapés, nécessiteux), venus lui rendre un dernier hommage au cimetière de Kawsara, se sont joints les membres d’une forte délégation officielle comprenant le Président de l’Assemblée nationale d’alors, Abdoul Aziz Ndaw, les Ministres Serigne Lamine Diop (Justice), Moctar Kébé (Travail et Formation professionnelle), Coumba Ndoffène Bouna Diouf (Relations avec les Assemblées), Mme Mata Sy Diallo (Émigrés), Abdoulaye Makhtar Diop (Jeunesse et Sports), entre autres parlementaires et chefs religieux.
Dans l’édition du quotidien national « Le Soleil » du 21 janvier 1991, Me Ousmane Ngom, alors député et président du groupe parlementaire du Parti démocratique sénégalais (Pds), a témoigné en ces termes : « En tant que collègue parlementaire, j’ai connu en elle une femme très engagée, de forte personnalité, défendant ses idées avec courage et conviction. Nous avons toujours gardé des relations cordiales malgré les joutes politiques qui nous opposaient au niveau de l’Assemblée nationale. Elle avait des sentiments maternels envers moi ». Dans le même journal, Mme Niellé Bâ, alors responsable communale des femmes socialistes, a dit ceci : « La disparition de Mantou est une énorme perte pour la ville de Thiès et l’ensemble du Sénégal. Elle est surtout une perte considérable pour les femmes ».
Bref, Mantoulaye Guène symbolisait le courage et l’engagement, la conviction et la foi, la force de caractère et la générosité. Elle incarnait les vertus de dignité, de franchise, de disponibilité et de sollicitude à l’égard de tous, principalement des moins nantis. Sa maison de Takhikao était le « mur des lamentations » pour des gens de tout âge, de tout genre et de toute confession qui venaient lui confier leurs angoisses existentielles. Partageant son savoir et ses avoirs, elle était collée à cette population avec laquelle elle se confondait dans toutes ses œuvres.

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